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Publié le 21 mars 2025

Le fléchage de l'épargne vers l'industrie de la Défense

Pour soutenir l’industrie de la défense, les ministères de l’Économie et des Armées organisaient une matinée consacrée, notamment, au financement des PME et ETI de ce secteur. Assurance vie et PER figurent parmi les pistes du gouvernement. C’est le branle-bas de combat dans le domaine de la défense depuis plusieurs semaines. Les velléités américaines de prendre du recul sur le soutien au Vieux Continent ont réveillé une Europe bien au chaud sous la protection des États-Unis et qui ergotait depuis plusieurs années sur les dépenses militaires. À cet égard, la France demeure un acteur clé sur ce sujet en tant que puissance nucléaire. Mais, comme l’a souligné Sébastien Lecornu, ministre des Armées, ce jeudi matin dans le cadre d’une matinée consacrée au financement de la Base industrielle et technologique de la défense (BITD), c’est un secteur qui a souvent fait les frais des coupes budgétaires publiques. 1 à 3Mds d’euros dans les cinq ans C’est pourquoi, sous l’égide de son ministère et de celui de l’Économie, les acteurs de la filière s’étaient donné rendez-vous à Bercy pour trouver des solutions afin de relancer le secteur. Ce dernier intègre neuf grands groupes de portée mondiale. Mais surtout 4.500 start-up, PME et ETI. Or, « leur structure financière apparaît plus fragile que dans le reste de l’économie, avec notamment un endettement plus élevé et une capitalisation souvent insuffisante », constate Éric Lombard dans son discours d’introduction. Ce sont donc essentiellement des fonds propres dont elles ont besoin. « 1 à 3Mds d’euros sur les cinq ans à venir », selon le locataire de Bercy. Et ce dernier de rappeler que les investisseurs institutionnels privés jouent déjà le jeu. « Nous ne partons pas de rien, indique Éric Lombard. […] Ainsi les banques françaises mobilisent-elles déjà 37Mds d’euros de financement. Les assureurs déploient plus de 20Mds d’euros en dette et en fonds propres ». Mais le gouvernement souhaite aller encore plus loin. Sans pour autant « faire main-basse sur l’épargne des Français », précise le ministre de l’Économie. Des assureurs peu visibles Du côté des assureurs, PER et assurance vie sont appelés à la rescousse. Et pour inciter les Français à investir dans la BITD, toutes les conditions sont d’ores et déjà réunies. La loi industrie verte impose en effet de présenter un mode de gestion pilotée incluant une part minimale de non coté. Tous secteurs confondus, le gouvernement anticipe 1 à 2Mds d’euros par an d’investissement sur les actifs non cotés. Il espère par conséquent qu’une part de ces flux se portera sur les industries de la défense. Malgré ce potentiel, aucun assureur n’était invité à s’exprimer lors des deux tables-rondes organisées ce jeudi, si ce n’est Renaud Dumora, président de BNP Paribas Cardif. Ce dernier a d’ailleurs annoncé que le bancassureur allait doubler son encours sur la défense en ajoutant 500M d’euros supplémentaires. De fait, une grande majorité des intervenants de ce matin provenaient du secteur bancaire ou de la gestion d’actifs. À l’image de Sienna IM qui lance le fonds de dette privée Héphaïstos. Ce dernier a pour ambition de lever 500M à 1Md d’euros. La France Mutualiste « sera parmi les premiers investisseurs avec un soutien financier tangible », annonce le gérant. Rappelons que la France Mutualiste fait partie du groupe Malakoff Humanis qui, en 2022, cédait à Sienna IM une part majoritaire dans Malakoff Humanis Gestion d’Actifs devenu Sienna Gestion. « Produire des armes, ce n’est pas sale » Par ailleurs, Tikehau lance une nouvelle unité de compte dédié à l’industrie de la défense et destinée à l’assurance vie ainsi qu’aux PER. Enfin, Bpifrance crée également un fonds, « Bpifrance Défense ». Les épargnants pourront investir via leurs contrats d’assurance vie moyennant un ticket d’entrée minimum de 500 euros. La cible est 450M d’euros. Les deux ministres ont, en outre, tenu à clarifier la compatibilité de ces investissements avec les critères ESG et ISR. « Ma vision est claire : oui, l’investissement dans la défense est compatible avec les théories d’investissement responsable », clame Éric Lombard. Le nouveau référentiel du label ISR en œuvre depuis le 1er janvier 2025 n’exclut pas les armes si ce n’est « la production d’armement ou de services ou composants spécifiquement conçus pour les armements controversés tels que décrits par certaines conventions internationales ». « Produire des armes, ce n’est pas sale, renchérit Sébastien Lecornu. L’arme n’est pas le problème, mais c’est ce que l’on en fait ».
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